Avec
le succès tout relatif des 860 et 900 GT/GTS, Ducati dut reconnaître que la
tentative d’évolution du vieux twin en L de 750 fut un échec.
Quelque chose était
nécessaire, un modèle qui pourrait attirer le public et ranimer le charme. L’enjeu
ne consistait pas simplement à présenter une bonne machine de sport que tout
motard aspirerait à posséder et que certains achèteraient car ce genre était
déjà représenté par la gamme SuperSport. Ce nouveau modèle devait rallier un
large public en offrant suffisamment d’attirance tout en restant pratique.
Cette machine fut la
Darmah SD ( du nom d’un tigre dans un conte pour enfant en Italie), une moto
nouvelle de A à Z : un look résolument nouveau, un cadre et un moteur repensés.
L’idée conductrice
de ce nouveau projet était de capitaliser le concept du système desmo en l’incluant
dans un ensemble moderne routier. Le marché du milieu des années 70 demandait
un peu plus de sophistication et Ducati dut revoir sa politique consistant à
considérer comme secondaire tout ce qui ne touchait pas l’accélérateur, le freinage
et la maniabilité.
Il fallait à présent
des composants et un système électrique digne de ce nom, une boîte agréable,
bref rien qui ne puisse déplaire aux journalistes et au public.
La présentation du
projet Darmah démarra en décembre 1976 au salon de Bologne et les réactions
de la presse comme du public furent très enthousiastes. En mai 1977 les premières
machines étaient en vente en Italie et deux mois plus tard en Angleterre.
Le cœur de la machine
était le twin en L à 90° basé sur le 863.90 cc de 86 x 74.4mm déjà utilisé sur
les 860 GT et GTS. Le plus gros changement qui y fut apporté constitua l’introduction
des têtes de cylindres équipées du desmo (même arbres à cames que sur la 900
SuperSport). Celles ci étaient très semblables à celles équipant les 900 SuperSport
mais pas interchangeables, la faute à la différence de taille des carburateurs :
32 mm pour la Darmah contre 40 à la SuperSport. A la différence de cette dernière
la Darmah utilisait des carburateurs plus petits utilisant des filtres à air
séparés, un par carburateur.
La première année il n’y eut qu’une modification apportée à partir du moteur
numéroté 901288 : le maneton qui était jusqu’alors échelonné à 36 mm fut
remplacé par un modèle de 38 mm.
La boîte à 5 rapports
était la même que sur les twins en L précédents mais Ducati introduisit un système
de sélecteur à gauche. Ces petits détails démodèrent rapidement les GT et GTS.
Léo Tartarini était
le concepteur de la ligne de la Darmah. Il avait appliqué à ce nouveau modèle
un traitement déjà essayé sur la 500 Sport Desmo : une ligne fine reliant
de manière harmonieuse réservoir, siège et partie arrière de la moto.
Le premier modèle était
rouge avec une ligne blanche et un cadre peint en noir. Le design si particulier
par rapport à la 860 GT faisait paraître la Darmah beaucoup plus basse.
La petite bosse située
derrière la selle n’était pas simplement là pour le design car elle abritait
un compartiment de rangement avec un système de verrou. Le reste de la machine
était chargé de chrome et d’alliage poli à l’exception des jantes à cinq branches
Campagnolo en alliage doré.
Le bras oscillant avait
été modifié pour proposer pour la première fois sur une Ducati de tourisme un
frein à disque à l’arrière lui conférant une bien meilleure force de freinage.
A l’avant une fourche
de 38 mm fourni par Ceriani ou Marzocchi selon le cas : jusqu’au numéro
moteur 901173 les motos équipées par Ceriani avaient une fourche de 608 mm de
long alors qu’après elle ne faisait plus que 580 mm.
Pour la première fois sur une Ducati de série, un amortisseur de direction fut
greffée à la moto. Son action pouvait surprendre dans les virages très lents
mais son efficacité se révélait dans les courbes larges et rapides.
Les roues de 18’’ en
alliage avaient un look flatteur mais suite à des problèmes sur les Campagnolo
d’origine, des Speedline puis des FPS les remplacèrent (les Speedline se brisant
souvent au niveau des fixations).
Beaucoup d’attention
fut apportée pour rendre la Darmah civilisée et attirante aux yeux des motards
habitués à rouler en japonaise. Des progrès furent notamment apportées sur le
système électrique : en dehors de l’alternateur de 200 w, de la batterie,
du régulateur et des clignotants, tout le système électrique était nouveau.
La politique de remplacement
était simple : tous les composants italiens cédèrent leur place à du Bosch
pour l’allumage, du Nippondenso pour les instruments et du Lucas pour le démarrage.
Certaines critiques
reprochèrent à Ducati de se rapprocher des standards japonais en montrant du
doigt les éléments Nippondenso. Il est vrai que le tableau de bord était très
fourni avec pas moins de sept lampes : deux rouges, deux vertes, deux oranges
et une bleue.
Les repose pieds furent
améliorés et de nouvelles béquilles apparurent. C’était une machine conçue pour
durer et rester en bonne apparence. Si la peinture était de bonne qualité, la
selle s’attira de nombreuses critiques à cause de ses craquelures eut du fait
qu’étant située trop près du réservoir, la peinture de celui ci s’écaillait.
La Darmah était pourvue
de moins de chrome que ses aînées et il se concentrait surtout au niveau de
l’échappement, le même que sur les 860 et 900 GTS. Mis à part la partie entourant
le phare, la qualité du chrome était bonne.
Un demi garde boue
arrière fut monté pour protéger les éléments électriques et la partie arrière
du moteur.
3.
LES EVOLUTIONS ET LA 900 SS DARMAH
En 1978, le magazine
Cycle world’s écrivait au sujet de la 900 Darmah :
« La Darmah constitue
probablement la plus impressionnante modernisation des grosses cylindrées Ducati
depuis les premières 750 cc apparues il y a six ans »
Un an après son lancement,
la version rouge et blanche fut suivie par une version noire et dorée. Présentée
avec des Lafranconi et ces carburateurs de 32, la majorité des machines produites
furent néanmoins équipées de Conti et de carburateurs de 40. Cette modification
conduisit à l’appellation « Sport » (SD Sport) que reçurent ces motos
bien qu’elles n’offraient des performances à peine meilleures que les Darmah
standards.
Pendant que la 900 SuperSport se muait en MHR, l'usine décida d'investir
une nouvelle voie plus routière pour sortir une version équipée
du démarreur électrique et sans l'option selle monoplace : la
900 SuperSport Darmah.
Elle fut présentée au salon de Bologne en 1978 et la production
démarra très vite. Au printemps 1979
la gamme Darmah s’étoffa donc avec l’arrivée du modèle Darmah SuperSport.
La Darmah SS reçut
le vilebrequin de la 900 SuperSport ainsi que les mêmes têtes de cylindres et
des carburateurs de 40 (bien que sur certains marchés, la Darmah SS était équipée
de Lafranconi, de carburateurs de 32 et de têtes de cylindres de Darmah classique).
Le démarrage électrique était le même que celui de
la 900 SD et partageait avec ce modèle le numéro moteur démarrant
avec la séquence DM 860 903762.
L'alimentation était assurée par une paire de carburateurs Dell'Orto
PHF 32 AD/AS et de Lafranconi. Les séquences de cadre étaient
référencés par un numéro en DM 900 SD, débutant
à 902960.
Elle reçut un demi
carénage en fibre de verre type SuperSport et des garde boue en acier. Le réservoir,
les caches latéraux et le carénage reçurent une peinture bleu métal avec des
inscriptions bleu sombre.
Les caches latéraux repri rent l’emblème du tigre mais en lieu et place du logo
« SD » ils arboraient le logo « SS ».
A la fin de l'année 1979 et pour éviter toute confusion avec la
MHR, la 900 SD reprit les séquences de cadre en DM 900 SD débutant
avec le numéro 95 001. Ainsi à partir de septembre 79, les 900
SD et SSD partagèrent les numéros de cadre.
La SSD reprit de nombreux éléments de la SD : réservoir
de 15 litres, selle détachable aux couleurs bleues, instruments et témoins
Nippon Denso, leviers, poignées, phare avant Bosch (180 mm), phare arrière
et clignotants CEV de même qu'un élément Païoli reliant
le tube droit de la fourche au cadre.
La SSD se différenciait surtout de la SD au niveau du tableau de bord
et la connection avec le té de fourche sypérieur (même système
que sur la MHR).
La position de conduite fut modifiée l'année suivante notamment
au niveau des cale pieds. Toutes les 900 SSD furent équipées de
fourche Marzocchi de 38 x 600 mm munie de fourreaux en aluminium poli. A l'arrière
les amortisseurs étaient des Marzocchi oléo-pneumatiques de 330
mm.
La SSD de 1979 reçut des roues magnésium Speedline munies de disques
de frein différents de ceux équipant les SD et les SuperSport
de la même année : trois disques ventilés de 280 mm. Les
étriers et les maîtres cylindres de freins étaient ceux
de la SD de même que les pneus, des Pirelli Gordon 3.50 H 18 et 120/90
v 18.
La demande pour la
Darmah SS s’était essoufflé si bien qu’en 1980 elle fut produite en plus petite
quantité, reprenant les modifications apportées sur le moteur
de la 900 SD : arbres à cames, couvercle d'embrayage.
La production de la SSD 1980 s'arrêta à la fin de l'année
aux alentours du moteur numéroté 905900 et certaines des ultimes
machines reçurent les nouvelles modifications apparues en 1981 : modification
de l'allumage, cloche d'embrayage, guides et sièges de soupapes.
Les roues étaient à présent des FPS aluminium, les branches
étaient tout d'abord en alu poli puis plus tard elles furent peintes
couleur or. Le plus gros changement concerna le support des cale pieds et les
leviers de freins à partir du cadre numéro 950762 et du moteur
numéro 904414. Les cale pieds arrière furent déplacés
plus bas et cela entraîna des modifications de position des commandes.
La production de la 900 SSD s'arrêta
En 1983 et 1984 la SSD fut produite épisodiquement en petite quan
En novembre 1981 fut
présentée à Milan une version complètement routière munie d’une finition rouge,
d’un porte paquets, de sacoches et d’un tête de fourche imposant. Mais cette
moto n’attira guère de passion et pas un seul modèle ne fut importé en Angleterre.
C’est toutefois sur
ce marché que les dernières Darmah trouvèrent acquéreur : construites en
1983, ces ultimes modèles reçurent une peinture gris métal identique aux 900
S2 de la même année.
C’est alors qu’une
conférence de presse fit l’effet d’une bombe lorsque Ducati annonça qu’elle
cessait de produire des motos pour se consacrer à la fourniture des seuls moteurs
pour le compte de Cagiva.
Ainsi s’acheva la carrière
de la Darmah alors que l’usine continuait la production de la 900 S2 et de la
MHR.
L’avenir réservait
pourtant aux fans de Ducati une bien belle surprise avec l’arrivée d’un tout
nouveau moteur qui allait donner naissance à des motos mythiques : le moteur
Pantah.
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